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Femme de fête et femme de libération

Joséphine Baker est une chanteuse, danseuse, actrice, meneuse de revue au cours des années folles… Elle est aussi engagée dans la lutte ségrégationniste aux États-Unis et une résistante française. Une double casquette d’artiste et d’espionne qui lui vaut sa place au Panthéon. Considérée comme une héroïne aux yeux de la France elle devient la sixième femme et la première femme noire de l’histoire à y entrer, le 30 novembre 2021.



Joséphine Baker, première icône noire des Années folles en France et première femme noire à entré Panthéon. L’annonce est faite par l’entourage d’Emmanuel Macron le 22 août 2021, la cérémonie se déroule trois mois plus tard, le 30 novembre. Elle rejoint les six autres femmes déjà présentes : la femme de l’ancien Ministre de l'Europe et des Affaires étrangères de France Sophie Berthelot, la physicienne et chimiste Marie Curie, la résistante française et militante des droits de l'homme et de la lutte contre la pauvreté Geneviève de Gaulle-Anthonioz, la résistante et ethnologue Germaine Tillion et l’ancienne présidente du Parlement européen Simone Veil. Le président de la République, dans son discours au Panthéon dans le coeur du Ve arrondissement et du quartier latin, dessine les grandes lignes de sa carrière : « Elle se voue toute entière à sa nouvelle patrie et à la défense de ses valeurs ». Son engagement aux côtés de Martin Luther King contre la ségrégation raciale qui sévit aux États-Unis et contre l’antisémitisme durant la Seconde Guerre mondiale dans la résistance pour la libération de la France, explique son admission. Son corps reste dans le cimetière marin à Monaco où elle repose depuis l’année de son décès, en 1975.


Discours du président Emmanuel Macron lors de la cérémonie de l’entrée de Joséphine Baker au Panthéon le 30 novembre 2021. ©Le Monde

La double casquette de Joséphine Baker : l’artiste et l’espionne

« J’ai quitté l’Amérique du Nord avec un temps brumeux, et je suis arrivée en France avec le soleil de France dans mon coeur {…} Je savais, par mes parents, qu’en France j’aurais la liberté d’esprit et de corps ». Joséphine Baker pose ses valises à Paris à l’âge de 19 ans. Afro-américaine et petite-fille d’esclaves, elle façonne un personnage cocasse qui fascine la capitale française. Elle se fait connaître dans la Revue nègre au théâtre des Champs-Elysées en 1925, jusqu’à devenir la vedette du music-hall et l’icône des Années Folles. La star tombe amoureuse de la ville des Lumières, seul lieu permettant d’être libre à ce point, elle obtient la nationalité française en 1937 après son mariage avec Jean Lion : « Paris, femmes, soleil, soleil de minuit. Le Bois, le thé, le dancing, les courses, le cabaret. Femme… Est-ce la même ? Je ne la reconnais pas, ce matin, elle était si simple, si effacée dans sa robe presque unie. La voici ce soir, chair et perles. », Les mémoires de Joséphine Baker, recueillis par Marcel Sauvage (1949). Cet amour, elle le chante dans son plus grand tube « J’ai deux amours », écrit par Géo Koger et Henri Varna sur une musique de Vincent Scotto.




Quand la Seconde Guerre mondiale éclate, Joséphine Baker rejoint les services secrets de la France libre et s’acquitte de missions d’espionnage en France, au Portugal et au Maghreb. Joséphine Baker rejoint la ligue internationale contre l’antisémitisme dès 1938, puis devient officier de l’armée de l’air, servant comme infirmière dans le cadre d’action organisé par la Croix-Rouge. Elle donne des concerts mémorables en soutien au moral des troupes alors que l’Allemagne nazie effraie l’Europe. Emmanuel Macron explicite son engagement dans son discours du 30 novembre 2021 au Panthéon : « Troquant les feux de la rampe pour la flamme de la résistance, elle devient avant même le 18 juin, honorable correspondante et sert son nouveau pays au péril de sa vie ». Charles Onana raconte dans Joséphine Baker contre Hitler que l’icône des années folles protège les résistants et les Juifs dans son château des Milandes, transformé en antenne radio, elle parcourt l’Afrique et l’Europe pour transmettre des informations confidentielles écrites à l’encre sympathique sur ses partitions ou cacher dans ses robes, elle traverse le désert en jeep pour galvaniser les soldats préparant le débarquement de Provence… Ce rôle décisif dans la Libération de la France lui vaut de nombreuses décorations : la Légion d’honneur, la Croix de guerre et la Médaille de la Résistance. « Un combat pour la France libre sans calcul sans quête de gloire, dévouée à nos idéaux », qui justifie sa place parmi les 81 héros panthéonisés à ce jour.


©Mandy Yahiaoui




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